Une histoire de foot
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Les lieux-dits Zweckbrunnenmatten et Unteres Haussigfeld à Rosheim font partie d’une vaste zone réservée pour des équipements publics de sports, de loisirs, d’enseignement, d’activités culturelles et périscolaires (Zonage UE du Plan Local d'Urbanisme). Aujourd'hui, les surfaces non encore bâties sont occupées par des vergers entretenus et qui appartiennent ou sont loués à de nombreux propriétaires.
Il existe déjà, entre autres, dans cette zone UE deux terrains de football et un clubhouse utilisé par le Football Club de Rosheim. La vétusté des locaux, mis à disposition des footballeurs par notre commune, nécessitait depuis longtemps une rénovation ou une reconstruction, qui aurait dû faire l’objet d’une concertation préalable sur leur devenir.
Fin 2017 le maire décide de lancer des études pour la construction d’un nouveau clubhouse et d’un terrain synthétique d'entraînement de football, sans que l’opportunité de ce projet d'investissement ait été préalablement débattue en conseil municipal. En effet, en plus des 2 terrains de football à Rosheim, les communes avoisinantes, dont les clubs fonctionnent "en entente" avec le FCR pour la constitution de certaines équipes, sont aussi très bien dotées.
D'ailleurs, que va devenir l'ancien terrain de foot situé près du collège ? Doit-il être vendu à un promoteur immobilier comme l'autoriserait la révision en cours du PLU ? Il aurait en effet été question de vendre ce terrain (inondable) afin de payer le stade synthétique… puis Michel HERR aurait proposé, lors de sa campagne électorale des municipales 2020, d'en faire un espace vert ou des jardins familiaux. Quand peut-on espérer une concertation sur cette question ?
Figure 1 : plan du projet de terrain synthétique d'entraînement de football d’après le Permis de construire du 19 novembre 2018. L'emprise du terrain de foot couvre les parcelles privées 386, 102, 104 et 107, et affecte la parcelle communale 335
Fin 2018 l’avant-projet définitif est adopté : la partie bâtiment estimée au départ à 1,2 M € atteint maintenant 1,5 M € HT, et la partie terrain estimée à 0,9 M € est à 1,1M € soit 28% d’augmentation sur le bâtiment et 17% sur le terrain. A cela il faut ajouter 250 000 € HT de maîtrise d'œuvre.
Or la Ville de Rosheim n’a pas toute la maîtrise foncière, notamment sur la partie dévolue au terrain de foot synthétique (figure 1). Quatre parcelles (en bleu) appartiennent encore à des propriétaires qui n’ont pas donné leur accord et 3 parcelles (en jaune) appartiennent à la Commune mais sont données en location depuis des années et leurs baux respectifs n’expirent que le 11 novembre 2020.
Pourtant Monsieur le maire Michel HERR engage les travaux de construction du terrain synthétique le 13 janvier 2020, deux mois tout juste avant les élections municipales. Les arbres fruitiers sont abattus et le terrain nivelé. Quelle urgence absolue pouvait justifier de piétiner le droit de propriété, droit inviolable et sacré de notre Constitution ? L'approche des élections peut-être ?
Des propriétaires courageux, Bernard et Dominique MEYER, portent plainte au Tribunal administratif de Strasbourg, qui ne peut que constater dans son ordonnance de référé[1] « une atteinte manifeste au droit de propriété ». La Ville de Rosheim échappe à l’arrêt complet du chantier parce que ses avocats ont attesté que les travaux étaient suspendus sur les parcelles non encore acquises, ce qui est une dissimulation de la vérité étant donné que les travaux se sont poursuivis sur l’ensemble de l’emprise du terrain jusqu'à leur confinement pour cause de CoViD-19.
[1] TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE STRASBOURG - No 2000929 - Ordonnance du 13 février 2020
Figure 2 : Plan d'avant-projet présenté au conseil municipal du 27 janvier 2020. L'emprise du terrain de foot n'atteint pas la parcelle 335
Monsieur le maire Michel HERR a été interpelé à ce sujet par l'opposition lors d'un conseil municipal surréaliste le 27 janvier 2020, qui a été décrit en détail par la journaliste des DNA qui y assistait dans un article publié le 30 janvier[1]. Le maire y déclare assumer seul le démarrage des travaux : « j'endosse, seul, la responsabilité du lancement du chantier » en « étant conscient d’être sur la ligne rouge » suivant sa propre expression pour dire que son action est condamnable. Pour tout cela il est immédiatement félicité par Pierre AUBRY, conseiller municipal d’opposition, qui annonce quelques minutes plus tard son ralliement à la liste municipale du maire sortant.
En lisant cela, on se demande si l'on est vraiment en France ou dans une contrée où la seule loi serait la loi du plus fort ?
Il est à noter que, lors de ce conseil municipal du 27 janvier, le maire a prétendu qu’une seule parcelle privée posait problème et qu’il avait fait « une proposition d’échange logique ». Il a présenté à l’appui de ses dires un plan d'ébauche d'avant-projet (figure 2). Ce document ne permettait pas de visualiser l'emprise foncière réelle des installations, telles qu'elles figurent dans le dossier du permis de construire délivré en 2018 et qu’elles sont en cours de réalisation sur le chantier. Pour cette raison, il n'a pas été possible de se rendre compte que la parcelle communale 335, proposée à l'échange de la parcelle privée 107 par le maire pour clore la négociation avec le propriétaire stigmatisé, est en fait partiellement bâtie dans le projet définitif du terrain d'entraînement de football (figure 1).
Aujourd'hui les travaux ont repris de plus belle sur le terrain depuis le 20 avril, les engins de chantier circulent tous les jours sur les parcelles ainsi spoliées. Les huissiers font des constats. On attend avec intérêt la prochaine audience sur le fond au Tribunal administratif. Les propriétaires lésés pourraient demander la remise en état de leurs parcelles, ce qui nécessiterait d'arracher le soubassement du terrain de foot synthétique ! et qui alors rembourserait le million d'euros engloutis dans ces travaux engagés illégalement par le maire ?
[1] Article des DNA du 30 janvier 2020.